Flair Flair – Interview : L’ODEUR DES NOIX D’ANNICK LE GUÉRER par Sarah Bouasse

« Parmi les odeurs qui comptent le plus pour moi, il y a celle des noix. Quand j’étais enfant, mes parents avaient une maison à la campagne, près de Paris où nous habitions.

L’interview par Sarah Bouasse

 Nous allions y passer les vacances, notamment l’été. Et il y avait des noyers dans le jardin. Lorsque les coques devenaient noires et que les noix tombaient, cela signait la fin des vacances et l’imminence de la rentrée des classes. Cette odeur des noix au sol, c’est pour moi celle d’une appréhension : retrouver bientôt le tumulte et l’empressement de la vie parisienne, les maîtres et les autres élèves, les devoirs…

Elle joue un grand rôle dans ma mémoire olfactive parce qu’elle fait ressurgir ce lieu, qui est lié à une idée paradisiaque de mon enfance et de ma vie familiale. On était là-bas comme dans un petit cocon, au milieu d’une nature belle et paisible, à regarder les péniches glissant sur la Seine… Je m’y sentais protégée de la grande hostilité du monde, enveloppée par la présence de mes parents – oui, comme une noix dans sa coque. Aujourd’hui encore, je ne peux pas sentir les noix tombées sans que ces souvenirs affluent. À l’inverse, les lilas évoquent pour moi le printemps, les beaux jours, la fin de l’école et l’arrivée des vacances. Des promesses de plaisir. En fait, mon enfance a été scandée par l’odeur des lilas et celle des noix. (…)

J’ai voulu montrer que l’odorat permettait bel et bien d’accéder à une connaissance du monde, une connaissance intuitive qui ne passe pas par la raison, mais qui est très fiable car elle nous met en rapport direct avec lui.

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